La mythologie gréco-romaine nourrit notre imaginaire et occupe une place centrale dans la culture occidentale. Le mythe (du grec muthos, ancien synonyme de « discours ») désigne un récit fictif, sans référence à la vérité de l’histoire. Le terme logos, à l’origine dusuffixe, renvoie à la raison et au besoin de démontrer. Le fait est que les Grecs et les Latins trouvaient dans les « mensonges » caractéristiques du mythe, dans les légendes, une explication à l’origine du monde, une morale, et bien des modèles de comportement individuel, collectif et politique. Dans son long poème, la Théogonie, Hésiode reconnaît : « Nous savons conter des mensonges tout pareils aux réalités. Mais nous savons aussi, quand nous le voulons, proclamer des vérités. » (v. 27-28)
Ce tissu de légendes aux nombreuses variations,[...]
L’origine du monde
Naissance des dieux
Tel qu’on le retrouve chez ces poètes, et en particulier chez Hésiode, le récit des origines - la cosmogonie - explique la formation du monde. Il se combine avec une théogonie, qui raconte la naissance des dieux dont le nombre s’élève à plusieurs milliers. Une des versions[...]
Les Titans
Gaïa (la Terre) engendre Ouranos (Uranus en latin, le Ciel) avec lequel elle s’unit pour donner naissance aux six Titans (de sexe masculin) et six Titanides (de sexe féminin), cruels et très puissants, dont le redoutable Cronos (Saturne pour le monde romain). Parmi les Titans ou Titanides (encore nommés dieux Anciens) figurent aussi Océan (le fleuve qui entoure le monde), Hypérion (le feu), Thémis (la loi), Mnémosyne (la mémoire) et Rhéa.
Le Titan le plus important et le plus jeune, Cronos, rendit son père Ouranos impuissant en le mutilant à l’aide d’une faucille. Après quoi, il enferma ses frères et sœurs dans le Tartare, une région des Enfers, et épousa Rhéa, sa sœur,[...]
Les Olympiens
Les dieux et leurs fonctions
Ces enfants de Cronos vont, autour de Zeus devenu le maître de l’Univers créé, se substituer aux dieux concurrents et élire domicile sur le mont Olympe, dans le centre de la Grèce, où les rejoindront d’autres divinités liées à eux par la naissance : Hestia (Vesta, chez les Romains), Arès (Mars), Athéna (Minerve), Apollon (Phœbus), Aphrodite (Vénus), Hermès (Mercure), Artémis (Diane) et Héphaïstos (Vulcain). À chacun de ces douze « Olympiens », première génération des dieux, sont attribuées des fonctions particulières : à Hestia, le foyer ; à Poséidon, la mer ; à Hadès, le royaume des morts ; à Héra, le[...]
Prométhée, voleur de feu
Pour Hésiode, cette création (appelée anthrogonie) est indissociable du mythe de Prométhée. Ce Titan, qui venait donc de créer les hommes, déroba le feu à Zeus pour leur permettre de se défendre, ouvrant la voie aux arts et techniques. Après s’être cruellement vengé de Prométhée, Zeus demanda à Héphaïstos et à Athéna de créer un nouvel être : ce fut la Femme, qu’on appela Pandore (« douée de tous les dons »). Celle-ci, d’une beauté parfaite, fut offerte par Zeus au frère de Prométhée,[...]
Des divinités en conflit
Les dieux, dont la généalogie peut être floue ou variable, sont à l’image des hommes. Ils entretiennent entre eux des relations conflictuelles, souvent fondées sur la jalousie et la défense de leurs prérogatives. C’est le cas de Zeus qui ne supporte pas qu’on porte atteinte à son autorité et qui n’entend pas rester fidèle à son épouse, la très possessive et vindicative Héra. Le dieu des dieux accumule les aventures amoureuses, tant avec des[...]
Les Enfers
À un niveau inférieur, on trouve des dieux tels que Éros (Cupidon), « le plus beau des dieux immortels », selon Hésiode ; les Grâces (ou Charites) ; les Muses ; Déméter (Cérès), déesse des moissons ; Dionysos (Bacchus), dieu de l’extase et du vin ; Pan (mi-homme mi-bouc, dieu des bergers et des troupeaux). À ceux-là s’ajoutent les dieux des eaux, comme Néré, Triton ou les Naïades (liés à Poséidon). Hadès (Pluton) et son épouse Perséphone (ou Proserpine) règnent aux Enfers, le royaume des morts. Là, entre des fleuves (le Styx, l’Achéron, le Cocyte, le Léthé, le Phlégton), sur les terres du Tartare, officie Charon le « passeur » des morts,[...]
Le panthéon romain
Le panthéon qui rassemble les dieux grecs a été repris dans sa presque totalité par les Romains et associé ou assimilé aux anciennes divinités latines, les numina (de numen, « puissance divine »). Quelques dieux nouveaux apparaissent toutefois à Rome, comme ceux qui protégeaient chaque famille, les esprits des ancêtres, les lares et les[...]
Les cycles héroïques
Les mythes grecs accordent une grande place à une autre catégorie de personnages, les héros. Un des plus célèbres est Prométhée, qui devient le rival de Zeus en dérobant le feu pour l’offrir aux hommes. Ou encore Achille (fils de Thétis et de Pelée), personnage central de l’Iliade, ou Énée (fils d’Aphrodite et d’Anchise), dont Virgile racontera la quête qui le conduira à quitter Troie pour aller fonder Rome. Tout aussi célèbres et présents dans divers récits sont les héros [...]
Le cycle thébain
C’est le cas du « cycle thébain », c’est-à-dire lié à la cité de Thèbes, d’où le héros Labdacos est originaire. Parmi les Labdacides, ses descendants, figurent Laios et son épouse Jocaste, leur fils [...]
Le cycle mycénien
Un autre cycle important est celui des Atrides (le « cycle mycénien »), dynastie maudite issue du roi de Mycènes Atrée, qui aura deux fils, Agamemnon et Ménélas. Le premier, après avoir sacrifié sa fille Iphigénie pour permettre le départ de la flotte grecque vers Troie, sera assassiné par son épouse Clytemnestre et vengé par son fils, Oreste, aidé de sa sœur Électre. Ménélas, le second fils d’Atrée, marié à Hélène, conduira avec Agamemnon la guerre contre Troie pour venger l’affront que représente l’enlèvement de son épouse. Le « cycle troyen » fait suite à cet événement et se construit autour du roi Priam, de son épouse Hécube et de leurs[...]
Le cycle des Argonautes
D’autres récits constituant un « cycle » sont consacrés à Jason, qui réunit sur son navire Argo un équipage, les Argonautes, pour partir à la conquête de la Toison d’or aux pouvoirs magiques. Là encore, le voyage est parsemé d’épreuves. Mais, avec l’aide de Médée, fille de roi aux pouvoirs de magicienne, Jason parvient à son but. Il emmène ensuite la jeune fille pour l’épouser. Après d’autres épisodes sanglants, il abandonne Médée qui, par vengeance, assassine les enfants qu’ils ont eus ensemble.[...]
Un système religieux
Les dieux dans la cité
La naissance des dieux, leur vie, leur généalogie, leurs attributs, leurs domaines d’influence, leurs exploits et leurs querelles sont parfaitement connus du peuple grec comme du peuple latin, tout aussi pieux, sinon plus. Cet univers polythéiste est certes perçu comme légendaire. Mais, de même que pour les religions monothéistes (le christianisme en particulier), il pose les bases d’une justice supra-humaine, fournit une explication aux mystères du monde et permet l’élaboration d’un « ciment » social et politique. Toutefois, les légendes liées aux dieux ne constituent pas à proprement parler une religion. S’il existe bien des prêtres chargés de présider aux cérémonies, aux sacrifices et aux rites, il n’y a pas de clergé véritable ni de hiérarchie. Les œuvres qui relatent les histoires des dieux et des héros ne constituent pas des textes sacrés, mais simplement un fonds mythique commun. On vénère les divinités sans forcément les juger infaillibles, et l’on peut même se montrer critique ou moqueur à leur égard.
En revanche, les mythes sont porteurs d’une vérité sociale et politique. Pour comprendre l’origine des cités, par exemple Thèbes, Athènes ou Rome, il est nécessaire de remonter aux héros fondateurs dont l’action fut guidée par les dieux. Pour expliquer un succès militaire (ou un échec), il convient encore d’en référer aux dieux qui, suivant la légitimité de l’entreprise, la soutiennent ou la freinent. C’est le cas pour la flotte grecque de Ménélas et Agamemnon, immobilisée en Aulide par la volonté de Poséidon. Pour mettre fin à une catastrophe (telle la peste à Thèbes dans le cycle thébain), il faut se tourner vers les dieux et implorer leur aide[...]
Fêtes et cérémonies
Des fêtes et des cérémonies rituelles contribuent à alimenter le culte des dieux et à transmettre le patrimoine culturel. Ainsi, les Panégyries rassemblent le peuple d’une cité autour de sacrifices d’animaux et d’offrandes accompagnés de chants et de danses. Vers la fin du mois de mars, au cours des Dionysies, en l’honneur du dieu Dionysos (Bacchus), on représente sous forme de concours des œuvres dramatiques et on déclame des poèmes. Tous les quatre ans à Athènes, pour les Panathénées, on célèbre le culte d’Athéna, la patronne de la ville. Les mystères d’Éleusis sont des rites d’initiation[...]
Une riche postérité
La mythologie gréco-latine constitue un des fondements majeurs de la culture[...]
Le langage
Des termes comme « chimérique », « hermétique », « dionysiaque », « saturnien », « atlas », « cerbère », « Europe », « python », « pactole », « volcan » prennent leur source dans ce fonds légendaire. « Le mythe d’Œdipe », « la boîte de Pandore », « un supplice de Tantale »,[...]
Les arts
De façon encore plus visible, l’iconographie a puisé abondamment ses sujets, surtout à partir de la Renaissance, à la source mythologique. On ne compte plus, dues aux peintres les plus célèbres, les représentations de Zeus et Léda, de la naissance de Vénus, des Trois Grâces, de Prométhée enchaîné sur le mont Caucase, de Diane chasseresse, d’Héraclès terrassant le lion de Némée ou décapitant l’hydre de Lerne, de[...]
La littérature et le cinéma
Le legs est tout aussi important en littérature. Une grande partie de notre théâtre classique choisit ses héros dans la mythologie, comme c’est le cas, pour s’en tenir aux écrivains les plus célèbres, de Corneille (La Toison d’or, Psyché, Médée), de Molière (Amphitryon) et surtout de Racine (Andromaque, Iphigénie, Phèdre). Différents dramaturges, français et étrangers, suivront cet exemple, jusqu’au XXe siècle, comme l’ont fait Jean Giraudoux (La guerre de Troie n’aura pas lieu, Amphitryon 38, Électre), Jean Cocteau (La Machine infernale), Jean-Paul Sartre (Les Mouches) ou Jean Anouilh (Antigone). Au cinéma, Ulysse occupe une place de choix dans le genre populaire du péplum, qui met en scène des héros de l’Antiquité. Avec Sigmund Freud[...]
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