Boris Godounov, de Modest Moussorgski : peindre le peuple russe
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« C'est le peuple russe que je veux peindre [...]. Le passé dans le présent, voilà ma tâche ! » Cette citation de Modest Moussorgski éclaire le propos de son opéra Boris Godounov.
L'opéra Boris Godounov propose différentes incarnations du peuple russe tout en mettant en place le personnage de Boris, tandis que l'orchestre soutient l'angoisse en permanence. Modest Moussorgski s'attache à peindre le peuple russe sous les éclairages les plus opposés. De la foule, particulièrement mouvante, émergent des prototypes tels que la nourrice, gardienne vigilante de l'enfance, l'aubergiste méfiante, les moines ivrognes ou encore l'innocent prophète.
D'instinct, Moussorgski s'est appuyé sur le rapport de forces qui anime la tragédie antique : face à la foule sagace qui observe et commente ses actes, un héros solitaire lutte avec son destin. Mais ce héros est russe, aussi complexe que les personnages de Fiodor Dostoïevski ; il se situe au-delà du bien et du mal. À l'aide d'un récitatif très travaillé, qui mêle cris et mélodies, souligne la valeur dramatique du silence et projette le monologue intérieur aux limites de la folie, Moussorgski parvient à suivre pas à pas tous les méandres de cette âme tourmentée.