Wolfgang Amadeus Mozart et l’opéra
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D'un point de vue formel, Wolfgang Amadeus Mozart ne peut en aucune manière être présenté comme un penseur de l'opéra, parce qu'il ne s'est laissé enfermer dans aucun genre : il les maîtrisait tous.
Wolfgang Amadeus Mozart traverse et bouleverse l'histoire de l'opéra avec peu d'œuvres. En effet, même si des pièces comme Mithridate (1770) ou Lucio Silla (1772), qui ressortissent à l'opera seria, sont déjà plus que des tentatives, c'est de 1781 à 1791, après s'être affranchi de la tutelle de l'archevêque Colloredo, qu'il va donner sa pleine mesure dans le grand œuvre lyrique que constituent Idoménée (1781), L'Enlèvement au sérail (1782), Les Noces de Figaro (1786), Don Giovanni (1787), Così fan tutte (1790) et La Flûte enchantée (1791). La Clémence de Titus, de 1791, semble presque anachronique dans cette énumération. Il ne s'agit pas là seulement d'une somme exclusivement mozartienne, mais bien d'une totalité universelle qui dépasse largement la personnalité de son créateur. À la différence d'un Gluck ou d'un Wagner, Mozart ne s'est pas chargé d'inventer des formes : que ce soit dans la sphère de l'opéra bouffe, de l'opera seria, du singspiel (opérette allemande), il se charge d'une métamorphose qu'il met en œuvre par la seule force de son architecture musicale. Sans doute Mozart n'attache-t-il pas moins d'importance à ses livrets que Gluck. Sa collaboration avec Da Ponte pour Les Noces, Don Giovanni et Cosi en témoigne. Mais, sans aucun doute, la musique prend le pas sur le texte. Et s'il est vrai qu'on peut parler d'adéquation idéale entre texte et musique, l'élaboration proprement musicale atteint une perfection inégalée. En outre, certaines analyses récentes ont montré que Mozart pouvait composer une musique à l'encontre d'un texte : dans Così fan tutte, par exemple, la légèreté de la comédie et la gravité de son support musical confèrent à l'œuvre une dimension tragique presque désespérée. Le génie de Mozart semble être de savoir s'adapter à l'héritage du passé et de n'agir que par la force et la magie de sa pensée musicale. Quelle que soit la matière dramatique, quelle que soit la forme, il impose sans violence sa loi, celle de l'évidence créatrice.
Mozart peut entrer dans l'histoire de l'opéra en rappelant qu'il fonde l'opéra allemand avec L'Enlèvement au sérail ou La Flûte, en évoquant sa science des ensembles, en se souvenant de la subtilité de ses mariages instrumentaux ou de sa pratique des différents récitatifs, en s'extasiant enfin sur cette étonnante fusion des genres qu'il réussit à mettre en œuvre dans Don Giovanni.