Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

Rome, Naples et Florence, de Stendhal (extrait)

Ce document est lié à l'article «  STENDHAL (1783-1842)  ».

Dans ce récit de voyage, publié en 1817 sous le pseudonyme de Stendhal (c’est la première fois qu’il l’utilise), l’écrivain rend compte de son émerveillement pour l’Italie à travers des notes, classées par ordre chronologique, de longueurs différentes. Le premier tome de l’œuvre est consacré au nord de l’Italie (à Milan, Bologne et leur région). Ici, c’est Milan et son théâtre de la Scala qui fascinent le futur romancier français.

26 septembre [1816]. – J’ai retrouvé l’été, c’est le moment le plus touchant de cette belle Italie. J’éprouve comme une sorte d’ivresse. Je suis allé à Dèsio, jardin anglais délicieux, à dix milles au nord de Milan, au pied des Alpes.

Je sors de la Scala. Ma foi, mon admiration ne tombe point. J’appelle la Scala le premier théâtre du monde, parce que c’est celui qui fait avoir le plus de plaisir par la musique. Il n’y a pas une lampe dans la salle ; elle n’est éclairée que par la lumière réfléchie par les décorations. Impossible même d’imaginer rien de plus grand, de plus magnifique, de plus imposant, de plus neuf, que tout ce qui est architecture. Il y a eu ce soir onze changements de décorations. Me voilà condamné à un dégoût éternel pour nos théâtres : c’est le véritable inconvénient d’un voyage en Italie. Je paie un sequin par soirée pour une loge aux troisièmes, que j’ai promis de garder tout le temps de mon séjour. Malgré le manque absolu de lumière, je distingue fort bien les gens qui entrent au parterre. On se salue à travers le théâtre, d’une loge à l’autre. Je suis présenté dans sept ou huit. Je trouve cinq ou six personnes dans chacune de ces loges, et la conversation établie comme dans un salon. Il y a, des manières pleines de naturel et une gaîté douce, surtout pas de gravité. Le degré de ravissement où notre âme est portée, est l’unique thermomètre de la beauté, en musique ; tandis que, du plus grand sang-froid du monde, je dis, d’un tableau du Guide : cela est de la première beauté !

Source : Stendhal, Rome, Naples et Florence, tome I, 1817 (extrait)

Pour citer ce document

Encyclopædia Universalis. Rome, Naples et Florence, de Stendhal (extrait) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )