Les Krupp, une dynastie industrielle de la Ruhr
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L'ascension de l'entreprise Krupp au début du 19e siècle, accompagnant l’entrée de l’Europe dans l’âge industriel, et sa toute-puissance de 1870 à 1960 constituent un parfait symbole de la Ruhr.
Venue du commerce, la famille Krupp s'intéresse à la fonderie à la fin du 18e siècle et y place ses avoirs. Friedrich Krupp installe lui-même une petite forge en 1811 près d'Essen. C'est son fils, Alfred Krupp, qui fait de son atelier l'une des aciéries les plus puissantes du monde. Son ascension s'explique par le Zollverein (union douanière), le développement des chemins de fer et de la navigation à vapeur. Habile à appliquer les progrès techniques, il conquiert une réputation mondiale par ses réalisations de qualité pour le rail. Travaillant avec une centaine d'ouvriers, il emporte les grands marchés mondiaux ; les Expositions universelles jalonnent ses succès et ses progrès. Dans le même temps, les canons d'acier, les blindages deviennent sa spécialité, à la suite des commandes des rois de Prusse devenus ses amis ; d'autres États suivent, et Krupp devient une sorte de roi de la Ruhr organisant des réceptions pour les maîtres du monde. Alfred Krupp emploie plus de 7 000 ouvriers en 1873, et ses usines s'étendent sur 300 hectares. Très autoritaire, il s'oppose violemment aux syndicats tout en édifiant un système d'assurance-maladie et de retraite.
Friedrich Krupp, son fils, plus détaché vis-à-vis de son affaire, siège au Conseil d'État de Prusse et au Reichstag. Il agrandit l'entreprise par des absorptions, acquiert des chantiers navals et introduit des méthodes plus scientifiques dans la recherche et la gestion. Il n'hésite pas à soudoyer un groupe de pression pour obtenir un budget militaire élevé, ce qui lui assure un marché important. En 1902, il règne sur un empire de 70 000 personnes.
Sa fille et héritière, Bertha Krupp, transforme la firme en société toujours dominée par elle, puis par son époux Gustav, qui tire profit de la Première Guerre mondiale. La défaite, puis l’occupation de la Ruhr par la France, change la donne. Mais le ralliement ultérieur aux nazis permet aux Krupp de bénéficier en retour de commandes destinées au réarmement. En 1939, la firme compte 190 000 ouvriers et employés.
Leur fils Alfred Krupp von Bohlen, directeur général durant la guerre, est arrêté en 1945 et l'entreprise condamnée au démantèlement. Alfred Krupp est libéré en 1951 par les Américains et redevient le maître de la Ruhr dès 1953 ; finalement, il est le premier industriel de la Communauté économique européenne en 1963. Mais en 1967, année de sa mort, les difficultés financières amènent la dislocation de l'entreprise.