L’Enfant, de Jules Vallès (extrait)
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Pour Jules Vallès, la vie est un combat et une incessante révolte contre l'injustice. Un combat qui commence au cœur de la famille, comme le montre cet extrait de L'Enfant.
1er janvier.
Les collègues de mon père, quelques parents d’élèves, viennent faire visite, on m’apporte des bouts d’étrennes.
« Remercie donc, Jacques ! Tu es là comme un imbécile. »
Quand la visite est finie, j’ai plaisir à prendre le jouet ou la friandise, la boîte à diable ou le sac à pralines ;
– je bats du tambour et je sonne de la trompette, je joue d’une musique qu’on se met entre les dents et qui les fait grincer, c’est à en devenir fou !
Mais ma mère ne veut pas que je devienne fou ! Elle me prend la trompette et le tambour. Je me rejette sur les bonbons et je les lèche. Mais ma mère ne veut pas que j’aie des manières de courtisan : « On commence par lécher le ventre des bonbons, on finit par lécher… » Elle s’arrête, et se tourne vers mon père pour voir s’il pense comme elle, et s’il sait de quoi elle veut parler ;
– en effet, il se penche et montre qu’il comprend.
Source : Jules Vallès, L’Enfant, chap. 7 « Les Joies du foyer », 1879 (extrait)